miércoles, 7 de enero de 2015

« Charlie Hebdo » visé par une attaque terroriste, la rédaction décimée


La rédaction du journal satirique Charlie Hebdo, au 10, rue Nicolas-Appert, dans le 11e arrondissement de Paris, a été la cible d'un attentat, mercredi 7 janvier en fin de matinée.

Suivez toutes les dernières informations dans notre live : Après l'attentat contre « Charlie Hebdo », stupeur et rassemblements de solidarité
  • 12 morts, 11 blessés, dont 4 grièvement
Douze personnes ont été tuées dans l'attaque, dont huit membres de la rédaction, parmi lesquels les dessinateurs CharbCabuWolinski et Tignous, ainsi queBernard Maris, chroniqueur pour Charlie Hebdo et France Inter.

Deux policiers ont également étés tués dans l'attaque. L'un, le brigadier Franck Brinsolaro, du Service de la protection (SDLP, ex-SPHP) était chargé de la sécurité de Charb, selon des sources syndicales policières. Il a été tué dans la rédaction. L'autre, Ahmed Merabet, a été tué à l'extérieur. Un hommes d'entretien de l'immeuble et un invité de la rédaction, Michel Renaud, ont également été tués.Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier en France depuis celui de 1961.
Le procureur de Paris, François Molins, a également annoncé que onze personnes avaient été blessées, dont quatre gravement, parmi lesquelles le journaliste Philippe Lançon et deux policiers. Selon les informations du Monde, Philippe Lançon, critique littéraire à Libération et chroniqueur régulier de Charlie, a été grièvement blessé au bas du visage par une balle. Il a été opéré à la Pitié Salpêtrière, et ses jours ne sont pas en danger.
  • « Les attaquants étaient renseignés »

Le procureur Molins a livré dans la soirée un premier récit des événements. Selon le procureur, au moins deux hommes cagoulés et vêtus de noir se sont introduits vers 11 h 30 dans les locaux de Charlie Hebdo après s'être d'abord trompés d'adresse, croyant trouver la rédaction au numéro 6 de la rue Nicolas-Appert.
Armés de kalachnikovs, ils ont tiré sur une personne qui se trouvait à l'accueil, avant de monter à l'étage pour atteindre la rédaction de Charlie Hebdo. Les journalistes étaient alors en pleine conférence de rédaction hebdomadaire. Les assaillants ont commencé à tirer sur les dessinateurs et journalistes, comme l'a relaté Coco, dessinatrice au journal, qui a précisé que les hommes « parlaient parfaitement le français » et « se revendiquaient d'Al-Qaida. »

« Les attaquants étaient renseignés et savaient qu'il y avait, le mercredi à 10 heures, la réunion de rédaction hebdomadaire. Sinon, le reste de la semaine, il n'y pas grand monde dans les locaux », explique une journaliste de Charlie Hebdojointe par Le Monde, qui n'était pas sur place pendant l'attaque.
Les assaillants sont ensuite sortis de l'immeuble. Une vidéo prise par un journaliste de l'agence Premières Lignes montre que les hommes ont crié « Allah Akbar » (« Dieu est grand »), en continuant à tirer. Selon des témoins cités par des policiers, les agresseurs ont également crié : « Nous avons vengé le Prophète. »
Les hommes sont montés à bord de leur véhicule, puis, dans leur fuite, ils ont visé une voiture de police. Sur cette photo que s'est procurée notre envoyée spéciale sur place, on peut voir les tireurs face à une voiture de police. Les hommes ont fait feu, les policiers ont répliqué puis reculé.
Deux autres policiers, qui étaient à vélo dans cette zone, ont tenté ensuite d'intervenir boulevard Richard-Lenoir. Ahmed Merabe, un policier du commissariat du 11e arrondissement, âgé de 42 ans, est touché par un tir. Les deux assaillants l'ont ensuite froidement abattu, selon le procureur de la République de Paris.

  • Des hommes visiblement entraînés
Des observateurs militaires interrogés par Le Monde remarquent que le comportement des tueurs est celui de soldats aguerris et témoigne d'un entraînement solide, ce qui conforterait, par exemple, l'hypothèse d'un profil d'hommes revenus de Syrie. Selon un policier, ancien membre d'un service de protection rapprochée, interrogé par l'Agence France-presse, « on le voit clairement à la façon dont ils tiennent leurs armes, dont ils progressent calmement, froidement : ils ont forcément reçu une formation de type militaire. Ce ne sont pas des illuminés qui ont agi sur un coup de tête ».
Dans une vidéo amateur montrant le meurtre du second policier, on les voit ainsidescendre de voiture et abattre le policier en tirant au coup par coup, et non en rafale, signe de leur capacité à utiliser leurs armes automatiques. L'un d'eux approche, achève le policier, vérifie qu'il n'y a pas d'autre membre des forces de l'ordre alentour, puis les deux tireurs remontent sans courir dans leur voiture.
  • Fuite vers le nord de Paris
Les deux assaillants reprennent alors leur fuite, passant place du Colonel-Fabien, en direction de la porte de Pantin. Ils percutent un véhicule Volkswagen, blessant sa conductrice. Ils abandonnent alors leur voiture rue de Meaux, près du parc des Buttes Chaumont, dans le 19e arrondissement.
Ils braquent alors le conducteur d'une Clio, s'emparent de la voiture et prennent la fuite à bord de la Clio. On perd leur trace porte de Pantin.
Une source policière a expliqué au Monde que « de très gros moyens sont mis en œuvre. On s'installe pour tenir dans la durée. Sont mobilisés les services de la DCPJ [direction centrale de la police judiciaire], de la PJPP [police judiciaire de la préfecture de police] et de la DGSI [direction générale de la sécurité intérieure]. Autotal, près de 3 000 policiers sont actuellement mobilisés ».
Une enquête a été ouverte pour assassinat, tentative d'assassinat, vol à mainarmée en bande organisée, et association de malfaiteurs en vue de préparer des actes terroristes, a annoncé le procureur Molins. Elle a été confiée à trois services de police : la DCPJ, la section antiterroriste de la brigade criminelle de la police judiciaire de Paris (le 36 quai des Orfèvres) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
  • Plan Vigipirate et cellule de crise
En conséquence, le plan Vigipirate a été relevé en Ile-de-France à « alerte attentats », le niveau le plus élevé a annoncé Matignon. Les sorties scolaires à Paris ont été suspendues jusqu'à nouvel ordre et les effectifs de soldats en patrouille passent de 450 à 650 hommes.
Le premier ministre, Manuel Valls, a « activé la cellule interministérielle de crise et a confié la conduite opérationnelle au ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve ».Un dispositif policier a également été déployé à proximité des autres rédactions parisiennes. 
  • Une journée de deuil national décrétée
  • François Hollande a décrété une « journée de deuil national » en France et renouvelé son appel au rassemblement du pays, après l'attentat. « Notre meilleure arme, c'est notre unité. Rien ne peut nous diviser, rien ne doit nous séparer », a déclaré le chef de l'Etat lors d'une adresse courte et solennelle à la Nation retransmise sur les chaînes de télévision. Les drapeaux seront aussi mis en berne pendant trois jours, a précisé François Hollande.
 Toute la journée, les réactions se sont multipliées pour dénoncer le drame. Particulièrement ému, l'ancien directeur de Charlie Hebdo, Philippe Val, a réagi sur l'antenne de France Inter, jugeant que « notre pays ne sera plus le même ».

Menaces courantes et protection policière
Selon le rédacteur en chef, Gérard Biard, actuellement à Londres et joint par Le Monde« les menaces étaient ressenties de façon moins forte ces derniers temps à Charlie Hebdo. L'attaque est d'autant plus choquante. »
Une journaliste de Charlie Hebdo, qui n'était pas sur place mais en contact avec des collègues sur place, explique que « ces derniers mois, on ne sentait pas une inquiétude immense malgré les menaces ».
« Bien sûr, nos locaux étaient sous protection policière, Charb était sous protection policière, mais il se déplaçait parfois sans ses policiers, ce qui est un signe qu'il n'était pas inquiet à chaque instant. (...) Luz et Riss avaient eux aussi eu une protection policière, mais elle avait été levée il y a un an environ. »

  • Organisation de rassemblements de solidarité
Après l'attaque, des appels à des rassemblements de solidarité avec la rédaction de Charlie Hebdo se sont multipliés partout en France. La rédaction du Monde a compilé une carte listant ces manifestations .